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Extraits du Roman "Deviens ce que tu es" de Frédéric ANDRIEU

 

 

Toujours avec la volonté de faire connaitre un jeune écrivain, et assurer la promotion d'un roman, quoi de mieux que de faire découvrir quelques extraits du livre afin de se donner une idée du style d'écriture de son auteur, du cadre de l'histoire, de l'intrigue...Si vous souhaitez plus d'extraits, merci de le faire savoir au travers des commentaires que vous pouvez laisser sur cet article.

 

 

 

 

 

 

EXTRAIT 1

 

 

 

L’homme racontait ce qu’il vivait et ressentait d’une façon tellement réelle et hors du temps à la fois, que nous étions, mon père et moi, obligés de l’écouter et de transformer ces récits en vérité effrayante. Je me trouvais projetée dans une fable funeste et mon sang se glaçait malgré la chaleur étouffante de la pièce où nous étions installés.


Le monde entrait dans la nuit, dehors une pluie violente pénétrait les corps jusqu’à l’os et tambourinait sur les murs de la petite cabane. La pénombre épaisse noyait toute joie. L’oiseau ne viendrait pas ce soir, cela me rassurait quelque part. Allais je avoir maintenant peur des oiseaux, peur qu’ils puissent se transformer en esprit ? Qui étaient-ils, cachaient ils des monstres terrifiants ? Mon sang se glaça toujours plus !


Et cette femme, malade, qui voyait tout et ne disait jamais rien. Pourquoi ? Peut-être était elle une sorcière et que toute sa lignée était maudite. Sa fille qui vit au village. Des sans-âmes !
Il était temps de quitter cette cabane, pensais-je. Il fallait que nous rentrions, la nuit était tombée et notre mère nous attendait. J’avais peur maintenant, et s’en était de trop. Mais mon père semblait fasciné par le récit de son ami, et le connaissant, il voulait également rester un peu avec lui pour le rassurer, tout en buvant probablement un dernier whisky.


Ce fut bien le cas, ils sirotèrent le fond de la bouteille, peut-être pour noyer leur peur commune de ce fantôme. Pourquoi ce satané esprit n’a-t-il pas également pris cette fichu bouteille de whisky, pensais je, cela nous aurait permis de rentrer plus tôt chez nous !

J’essayais de me faire remarquer de mon père pour lui faire signe de nous en aller, mais en vain, il était plongé dans ses pensées et dans son verre, et ne prêtait nullement attention à moi.
Je toussais, sifflotais légèrement, tournais sur ma chaise, rien n’y faisait. La discussion reprit alors.

- ma grand-mère m’avait raconté, il y a longtemps de cela, qu’une chose étrange, comme ce qui t’arrive actuellement, s’était produite dans une cabane auprès de la rivière, chez un couple de personne âgées. Si mes souvenirs sont bons, le monsieur malade était alité depuis plusieurs mois et ne pouvait plus se mouvoir, seule sa femme et ses enfants, pouvaient lui apporter une assistance au quotidien.
- Il me semble me rappeler de ces gens là, dit le vieil ami de mon père. Mais je ne les ai jamais fréquentés et je ne sais pas grand-chose sur leur vie.
- Moi non plus, mais ma grand-mère connaissait bien sa femme, elle s’était connue à l’école dans leur jeunesse. Donc des choses bizarres sont arrivées chez eux à plusieurs reprises, il y a eu d’abord de la nourriture qui a disparu à maintes reprises, ensuite une invasion de rats qui s’est produite chaque samedi pendant plusieurs mois, ils envahissaient leur cabane, même fermée, volets clos, on n’a jamais su comment, par dizaine, et grimpaient partout, sur la table, sur les chaises, sur les meubles, c’était horrible racontait on à l’époque.
- Et ont-ils réussi à s’en sortir ? demanda le vieil homme.
- Pas vraiment, le monsieur est mort.
- Et de quoi ? De sa maladie ?
- On ne sait pas, sa femme l’a retrouvé un après midi, les yeux ouverts, le regard fixe, le teint blafard. Il était recourbé sur lui-même, le corps raide en souffrance, les mains crispés tenaient encore le drap qui le recouvrait. La pièce était plongé dans la pénombre, le soleil se frayait un chemin au travers des rideaux décousus ce qui permit à son épouse de voir qu’il bougeait encore sous les draps, il n’était donc pas mort, comme elle l’avait cru en le regardant dès son entrée dans la pièce. Elle s’approcha doucement pour ne pas l’éveiller, et tira délicatement le drap pour mieux le couvrir. C’est alors qu’une bande de rats sortie de leur abri de toile, et se sauvèrent de la pièce par la porte restée entrouverte. Le vieil monsieur était bien mort, et les rats avaient commencé à lui manger les bouts de ses pieds. On n’avait jamais vu telle horreur auparavant, et cela est resté marqué dans les mémoires des anciens pendant très longtemps et encore aujourd’hui pour ceux qui sont encore de ce monde.

C’était horrible, pensais-je d’imaginer que de telles choses aient pu exister ! des rats mangeant des hommes ? Je vivais un vrai cauchemar, je ne voulais plus rien entendre ! mais comme ces deux histoires étaient identiques et étranges, les rats ou les oiseaux qui pénètrent dans la vie de ces pauvres gens pour les effrayer, les manger,  la nourriture qui disparaît à chaque fois sans oublier la maladie qui envahi le quotidien des ces personnages.

 

 

 

Extrait 2

 

 

Nous atteignîmes un passage plus abrupt, qui était plus à découvert, pensant y trouver un signe de Malee, mais nous ne vîmes rien. Le sentier était désert.

La chaleur commençait à donner toute son intensité, et montait en gamme au fur et à mesure de notre avancée dans la montagne. Nous ne comptions plus nos pas, ni les bonbons que nous ramassions par ci par là.
Nous croisâmes un troupeau d’éléphants d’une dizaine de bêtes avec leur cornac respectif qui marchaient à leur côté, les animaux charriaient des sacs et du bois.
Je ne manquais pas de regarder chacun d’eux pour voir si le jeune homme de la dernière fois se trouvait à tout hasard parmi le groupe, mais ma déception fut totale, il n’y avait que des cornacs d’un âge mûr aguerris par le difficile travail en montagne du transport à dos de pachydermes.
Ils tentèrent de comprendre ce que nous faisions dans cet endroit plutôt sauvage de la montagne et nous indiquèrent n’avoir rencontré, ni vu personne depuis les quelques jours où ils travaillaient dans le haut des collines.
Le doyen des cornacs ouvrait le chemin avec un gros éléphant male, il semblait paisible avec ses minuscules yeux qui observaient les trois inconnus que nous étions et ses oreilles qui papillonnaient comme pour montrer un peu de satisfaction de s’arrêter quelques instants. L’homme s’adressa alors à nous :
- c’est nous, les cornacs des montages, qui faisons tourner la terre en marchant avec nos éléphants très forts. Voilà pourquoi nous avançons sans jamais nous arrêter plus de temps qu’il ne le faut. Peut être croiserons nous votre fille, alors nous irons vous le dire, à votre cabane dans la plaine. Mais si vous ne la trouvez pas avant le milieu de l’après midi, rebroussez chemin et rentrer dormir paisiblement à votre cabane, la montagne la nuit est lugubre et vous pouvez rencontrer quelques animaux dangereux, le tigre d’Asie particulièrement. Faites preuve de vigilance surtout.

Nous étions tellement essoufflés que ni mon père, ni moi-même ne répondit. Ma mère était silencieuse, impuissante, et envahie par la peur de la nuit que le cornac avait décrite avec tant de réalité. Nous acquiesçâmes de la tête comme le faisait Malee d’habitude. Nous avançâmes devant nous et ils disparurent.

Encore un bonbon.

Le stock serait il suffisant pour nous indiquer où se trouvait ma sœur ?
Nous fîmes un arrêt de quelques minutes pour boire et reposer nos pieds meurtris par les pierres usées du chemin sur lesquelles il nous fallait prendre appui pour avancer dans cette montée.
Nous atteignîmes une falaise abrupte que le sentier longeait et où des grottes plus ou moins grandes avaient été façonnées par l’érosion du temps. Nous nous arrêtions à chacune d’entre elle pour nous assurer que Malee ne s’y trouva pas. Ma mère faisait résonner sur les parois lisses le nom de ma sœur qui rebondissait telle une balle de mur en mur et faisait s’envoler les martinets qui nichaient ou sursauter les chauves souris tête en bas qui nous observaient avec grand intérêt de voir enfin des visiteurs dans leur tanière ombragée et lugubre. Sur certaines parois, des échelles de bambou avaient été abandonnées par les chasseurs de nids jusqu’à la prochaine récolte, ils venaient en fonction des périodes pour arracher à ses pauvres martinets leur nid qui était devenu un met recherché et prisé pour la soupe, surtout à l’exportation vers la chine. Chaque nid valait un prix d’or, et les chasseurs n’avaient aucune compassion pour le pauvre petit animal qui se retrouvait sans endroit pour nicher, le fruit de sa salive qu’il avait
construit avec tant d’effort lui était volé pour le plaisir de l’homme peu respectueux. J’étais triste et je ne pouvais me résoudre à comprendre de tel comportement de ma race.

Devant la cinquième caverne que nous allions atteindre, un énorme arbre au feuillage fourni semblait garder l’entrée, et quelqu’un avait entouré son gros tronc d’un grand linge orange et jaune qui tenait grâce à un nœud bien serré. La tradition veut que chez nous, les arbres sacrés, bénis des esprits, protecteurs du mauvais sort, sont identifiés par des écharpes ou des linges qui habillent une partie de leur tronc.

Un bonbon était posé un pied de l’arbre.
Nous avançâmes vers l’entrée de la grotte. Il nous fallut du temps pour que nos yeux s’habituent à la pénombre envahissante. Un chant caressa notre ouïe, un chant doux et enveloppant que nous n’entendions qu’à peine. Quelque chose se passait dans cette caverne.
A quelques pas seulement de l’entrée, le monde reprenait ses droits, le monde chantait, le vent soufflait son air tiède, les insectes bruissaient, paisibles, et les couleurs reprenaient leur intensité.
Malee était assise, en tailleur, dans la position du lotus, à même le sol pierreux, et chantait. Une voix sortait de sa bouche, pas forte mais délicieuse. Elle chantait des prières bouddhistes, les yeux légèrement inclinés vers le bas, fixes et paisibles. L’incantation convoquait ses ancêtres dans le pentacle dessiné par sa voix. Sa silhouette vêtue de son habituelle tenue blanche ressortait dans l’obscurité de la grotte, elle composait devant nous un tableau dont le soleil lui-même semblait ne pas pouvoir pénétrer le cadre.

 

 

 

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27/09/2012
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